Florian Sicard, maroquinier et fondateur de la marque Etablissements Pardi est venu témoigner

Pour la deuxième fois chez les Compagnons du Devoir, nous avons invité un artisan à partager sa vie, sa vision de son métier, ses difficultés et ses motivations. Cette fois-ci Florian Sicard, maroquinier, est venu répondre à nos questions, au micro de Magali Perruchini auteure du blog Les Mains Baladeuses et du livre “Nouveaux Artisans”.

Florian et Magali

Florian et Magali

Groupes de discussion et de co-développement post-entretien avec Florian

Groupes de discussion et de co-développement post-entretien avec Florian

Quelques moments clés de ce témoignage :

As-tu eu une première vie professionnelle avant la maroquinerie ?

J’ai fait mes études aux beaux arts de Rueil Malmaison, école qui a fermé… J’ai recommencé aux Beaux Arts de Paris pour avoir un deuxième diplôme, identique ! J’ai appris pleins de choses fantastiques et notamment à développer beaucoup de choses avec mes mains sans être même conscient que j’avais envie d’en faire quelque chose. Ma première famille a donc été dans l’art contemporain, et ma spécialité était d’être artiste performeur. Mon travail consistait à utiliser une forme de mouvement avec mon propre corps sur lequel j appliquais des structures que je fabriquais moi même (bois, tissu…)

Quel a été ton déclic ?

Des rencontres et des besoins matériels. Mon métier de performeur ne me suffisait pas pour vivre donc je travaillais aussi à la Gaîté Lyrique. Le milieu culturel me plaisait beaucoup mais tous les 5 ans il y a un changement de directeur et d équipe. A la fin du mandat, je ne me retrouvais plus dans ce qu on m a proposé et je savais que j’avais envie de travailler de mes mains. J’ai profité d’un an de chômage et je ne voulais surtout pas regretter de ne pas avoir essayé. J’ai donc commencé avec la machine de ma mère à fabriquer des sacs, les premiers prototypes ! Fabriqués en tissu d’abord puis avec des empiècements en cuir en-dessous...

Les rencontres tu disais ? J ai fait une vente privée en déployant tout ce que je pouvais comme énergie dans la communication, dont flyers, affichettes... Pleins de copains sont venus et une personne est venue de l’extérieur. Elle m’a acheté un sac et ça a beaucoup compté car elle ne me connaissait pas. J’ai également gagné un peu d’argent avec les copains qui avaient eux-aussi acheté des pièces… J’avais organisé la vente chez une amie. Vers 22h quand j’étais en train de ranger, elle m’a appelé “j’ai rencontré une maroquinière, il faut que tu la vois”. J’envoie un mail et cette maroquinière me propose de boire un café . Je suis tombé amoureux de l atelier de Carole Gauthrot « l’atelier de toutes les matières ». Cette rencontre tombait au bon moment car j’avais cherché des formations et j’étais à chaque fois exposé à pleins de freins qui me semblaient insurmontables, notamment le budget. Je dois tout à Carole, elle m’a tout appris.

Peux-tu nous en dire plus sur cette formation AUPRÈS de carole Gauthrot ?

Fin Novembre 2014 j ai rencontré Carole et en janvier je lui ai fait une proposition : il me reste quelques mois avec le chômage, je ne suis pas maladroit, vous m’apprenez le métier et je suis votre petite main gratuite. Elle a dit oui et m’a pris sous son aile. Son entreprise tournait bien depuis 15 ans, au fur et à mesure elle m a donné des contrats, pas toujours passionnants mais ça m’a permis de continuer à progresser, me former, en travaillant d’arrache-pied.

Comment as-tu gagné ta vie ?

D’abord les contrats que me donnait Carole, puis j’ai trouvé des moyens alternatifs de garantir un revenu en louant mon appartement sur Airbnb et en faisant un prêt à la consommation de 4000€. Cela m’a donné un peu de confort quand j’ai lancé ma marque en juin 2016. Et puis j’ai appris par besoin. Quand on est motivé, on cherche les réponses où elles se trouvent !

Quelles ont été les étapes de la création de ta marque Etablissements Pardi ?

D’abord être le plus honnête avec moi même en m’acharnant à essayer de comprendre ce que j étais capable de faire car ma marque, c’est ma personne. Je suis artisan, mon entreprise c’est moi !

Comment gères-tu ton entreprise ?

Je fais beaucoup de choses moi même, et je n ai reçu aucune aide de ma famille. Sans me contredire, elle n’a pas jamais cru que je pouvais y arriver. Mais ce n’est pas plus mal car ça m’a obligé à trouver des moyens sans budget, à proposer des échanges de bons procédés. C’est comme ça que j’ai fait mon e-shop.

J ai 800 activités, mon meilleur ami c est mon iPhone et je priorise. Mais quand on est un chef d entreprise, il faut savoir dire stop et garder du temps pour soi. Il faut aussi savoir organiser son temps pour la création.

Comment trouves-tu tes clients ?

Les réseaux sociaux facilitent la visibilité et l’acquisition de quelques clients (plus instagram que Facebook où je ne totalise pas plus de 200 abonnés), mais ce n’est pas là où se trouve ma clientèle. Ma clientèle me connaît grâce aux boutiques et peu à peu j’ai des clientes fidèles. J’ai été exposé au Bon Marché (j’avais réussi à contacter la directrice du style qui n’a pas réagi tout de suite, mais finalement est revenue vers moi :-). Ce que je m’applique à faire c’est de fournir un service irréprochable : packaging, livraison, délai de réponse. Je dis toujours oui à une cliente ! C est la qualité relationnelle qui s instaure.

Un budget marketing ? Les seuls frais de communication que j’engage sont dans le shooting que je fais chaque année. Je me sens limité sur les prises de vues et je trouve que cela très important !

Ta motivation ?

Me lever le matin de me dire j aime ce que je fais !

Un conseil à donner à ceux qui veulent se lancer dans la maroquinerie ?

C est faisable ! On est conditionnés sans se rendre compte et c est bien de prendre du recul et de décider ce qui est important pour soi. Et il faut savoir saisir les opportunités, qui peuvent prendre du temps.